DEMAIN : LA MONARCHIE
Un projet politique pour la France de demain
Documents : lettres, discours et citations
Ecrits des Aînés de la Maison de Bourbon
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Jacques Ier : Lettre au Comte de Cathelineau-Montfort
Jacques Ier, Duc d'Anjou et de Madrid
Jacques Ier de Bourbon, connu aussi sous le nom de Don Jaime, a vécu de 1870 à 1931. Il était le fils de Don Carlos (connu des légitimistes français sous le nom de Charles XI) et de Marguerite de Parme, nièce du Comte de Chambord et arrière-petite-fille de Charles X, dernier roi légitime à avoir régné sur la France. Comme son père, Don Jaime a été à la fois roi de France de droit (sous le nom de Jacques Ier) et prétendant carliste au trône d'Espagne (sous le nom de Jacques III). Ce fut un grand voyageur qui avait un pied-à-terre à Paris mais sa résidence principale était à Frohsdorf.
Lettre au Comte de Cathelineau-Montfort
(6 décembre 1911)
CONTEXTE
La lettre suivante a été écrite le 6 décembre 1911 par le Duc de Madrid et publiée dans la revue légitimiste La Monarchie Française (1). Elle fait écho à un article paru dans L'Univers le 13 octobre 1911, relatant les obsèques du général de Charette, dont voici un extrait :
"La mise en bière a eu lieu hier après-midi. On a déposé sur le cercueil les deux épées d'honneur que le général a reçues des Femmes de France et des Femmes de Bretagne. Là aussi, ses décorations, où se remarque la croix de Saint-Louis, que le duc d'Orléans lui a remise en personne."
Lettre de Monseigneur le prince Jaime de Bourbon
Chef de la Maison de France
au Comte de Cathelineau-Montfort
Mon cher Cathelineau,
On m'a fait lire ces temps derniers dans un quotidien qu'au nombre des décorations qui figuraient sur le cercueil du général de Charette (2), on remarquait la Croix de Saint-Louis.
Je me refuse à croire à l'exactitude du fait.
Si le feu général avait eu la Croix de Saint-Louis, il n'aurait pu la tenir que du Comte de Chambord, de mon Père ou de moi. Or, nous n'avons jamais, ni mon Père, ni moi, octroyé cette croix à personne, et quant au Comte de Chambord, il n'en a accordé, pendant son long exil, qu'une seule, la même qu'il reçut sur les degrés du trône, et qu'il voulut attacher personnellement sur la poitrine de mon regretté Oncle le Comte de Bardi, pour récompenser sa brillante conduite à la bataille de Lacar, où il chargea, à la tête de la cavalerie carliste, les troupes alphonsistes.
J'accueille avec la même incrédulité l'information que vous me rapportez, selon laquelle le Duc d'Orléans paraît quelquefois avec le collier du Saint-Esprit, qui est mon apanage exclusif.
Le Chef de la Maison de Bourbon, c'est moi ; moi qui, dans ma lettre aux Souverains, à l'occasion de la mort de mon cher et regretté Père, ai solennellement déclaré que j'entendais revendiquer tous les droits et prérogatives qu'il me transmettait en dépôt ; moi qui tiens du Comte de Chambord, avec le Château de Frohsdorf, les reliques, les archives et les papiers de la Monarchie légitime, ainsi que la maîtrise des Ordres royaux.
S.A.R. Le Duc d'Orléans est d'autant moins qualifié pour faire un chevalier du Saint-Esprit, ou pour s'approprier cet Ordre, qu'il est le tout à fait dernier dans notre arbre généalogique, et que sa branche ne peut produire la moindre prétention qu'après la complète extinction non seulement de la mienne, mais encore de celles d'Espagne, des Deux-Siciles et de Parme.
Puisque vous disposez, mon cher Cathelineau, de l'excellente revue la Monarchie Française, où la tradition légitimiste est si vaillamment défendue, je vous autorise à faire état dans ses colonnes de cette lettre, que je ne veux même pas honorer du nom de protestation, mais simplement de mise au point d'une question qui ne peut être controversée.
Que Dieu vous garde, vous et les vôtres, mon cher Cathelineau, et croyez-moi toujours votre bien affectionné.
Jaime
(1) La Monarchie Française était un journal qui a existé en 1911-1912. Il était l'organe de l'Union Nationale d'Action Légitimiste.
Joseph de Cathelineau (1861-1953), comte de Montfort, était l'arrière-petit-fils de Jacques Cathelineau, généralissime de l'armée vendéenne, tué en 1793 et le petit-fils de Jacques-Joseph de Cathelineau, exécuté en 1832 pour avoir pris part au soulèvement de la Vendée initié par la Duchesse de Berry. Son père Henri fut un des proches conseillers du Comte de Chambord.
(2) Athanase de Charette de la Contrie (1832-1911) était un petit-neveu de François-Athanase Charette, le grand héros vendéen. D'abord au service du pape (zouaves pontificaux), il entra ensuite dans l'armée française. Il fut promu général en 1871.
COMMENTAIRE
Le Duc d'Anjou et de Madrid avait la réputation d'un prince aimant les plaisirs de la vie et ne se souciant guère de ses droits dynastiques. Ce texte apporte un autre éclairage sur ce prince : il avait parfaitement conscience de ses devoirs dynastiques et entendait faire savoir qu'il était le vrai chef de la Maison de Bourbon.